LE COMBAT ULTIME
La lutte entre les deux rivaux durait depuis trop longtemps déjà, au goût du panthéon égyptien. Seth, cependant, réclama la faveur d’une dernière chance. « Construisons chacun une nef de pierre, suggéra-t-il, et faisons une course sur le Nil. Le vainqueur aura la couronne d’Osiris. »
Le premier, Horus termina son bateau. Construit en bois de pin, il l’enduit entièrement de plâtre pour lui donner l’apparence de la pierre. Quand Seth le vit terminé, il coupa le sommet d’une haute montagne dans lequel il creusa une énorme embarcation en bonne et solide pierre. Le jour de la régate, le bateau de Seth coula à pic dès sa mise à l’eau. Mais Horus eut très peu de temps pour rire de son adversaire. Seth se changea en hippopotame et fracassa le bateau d’Horus en mille morceaux. Guère découragé, Horus se prépara à harponner l’hippopotame mais les autres dieux retinrent son bras. Ce dernier combat, censé tout résoudre, laissait au contraire les choses en l’état. Désespérant de trouver une solution, Horus vint trouver Neith, la déesse de la Sagesse, dans sa ville de Saïs. « S’il te plaît, implora-t-il, fais en sorte qu’un jugement sorte enfin. Durant huit décennies, Seth et moi n’avons cessé de comparaître devant le tribunal des dieux et nous n’avons pas progressé d’un pas. J’ai gagné plus de mille épreuves, mais Seth refuse toujours de baisser les bras et fait la sourde oreille aux injonctions de ses juges ».
Lorsque les autres dieux entendirent la requête d’Horus, ils tombèrent d’accord sur son bien-fondé. D’ailleurs, leur propre patience était parvenue à son terme. Thot suggéra à Rê de prendre conseil d’Osiris lui-même. Un messager se rendit donc dans le Bel Occident, royaume d’Osiris.
Après un long et pénible voyage au royaume des morts, le messager revint muni de la réponse d’Osiris. Bien évidemment, le dieu des Morts soutenait en tous points son fils. Il était d’ailleurs vivement mécontent que justice ne lui ait pas été rendue plus tôt. « Pourquoi faut-il que mon fils soit perpétuellement dupé? »
Rê, irrité qu’on l’interpelle sur ce ton, envoya derechef son messager porteur d’une réponse cinglante. Cette fois, Osiris se fâcha violemment: » Voici donc, répondit-il à son tour, comment la justice descend dans le Monde inférieur. Ici, dans mon royaume des morts, les démons sont puissants et nombreux: devrais-je en envoyer quelques-uns dans le monde des vivants pour qu’ils me rapportent le coeur des malfaisants? N’oublie pas que je suis plus puissant que vous tous: tôt ou tard, les dieux eux-mêmes viendront dormir dans mon Bel Occident. »
La menace d’Osiris régla rapidement la question. Réunis en conclave solennel, les dieux décidèrent enfin qu’Horus devait recevoir le gouvernement de la terre. Rê ordonna à Isis de lui amener Seth enchaîné, ce qu’elle fit avec plaisir. « Seth, demanda Rê, réclames-tu toujours le trône d’Osiris? » Seth sentit qu’il n’était plus temps de finasser. « Non, grand seigneur. Qu’Horus se présente devant toi pour recevoir le trône de son père. » L’interminable guerre prenait fin. Le jeune Horus reçut la couronne d’Egypte, et toute la terre se réjouit avec lui.
Quand à Seth, Rê ne l’avait pas mis à l’écart. « Tu peux m’accompagner dans les cieux, tu seras mon dieu des Tempêtes, annonça-t-il au perdant. Ton tonnerre et tes éclairs terrifieront les hommes pour l’éternité. »
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